Translate

lundi 18 septembre 2023

Voyage en Inde du Sud - Découverte de l'ONG Kudumbam (Emmaüs International) - Partie 4

 Deux exemples de formations à l'agriculture naturelle assurées en partenariat avec Kudumbam


Dans cet article, je vais sommairement présenter deux exemples de formations assurées directement ou indirectement par l'ONG Kudumbam. Ce son évidemment des formations à l'agriculture naturelles, effectuées auprès de deux publics différents.

- Formations assurée sur le terrain auprès d'agriculteurs :

Ce type de formation est assuré directement par les employés de Kudumbam, Ramadass en particulier, qui est l'expert technique en matière d'agriculture biologique.

Ces formations sont assurées soit à la ferme de Kolunji, ce sont alors les agriculteurs qui se déplacent, soit directement dans la ferme d'un agriculteur qui met son terrain à disposition, et les autres agriculteurs (et agricultrices) du village voisin se déplacent localement.

Dans l'exemple qui m'a été montré, nous étions dans une ferme située à quelques kilomètres de la ferme de Kolunji. Une quinzaine d'agriculteur ont été réunis pour suivre une formation à la maîtrise des maladies qui peuvent affecter les cultures.

Ce type de formation est assuré pour des agriculteurs en transition vers un mode d'agriculture naturelle, chacun étant dans un état d'avancement différent dans sa reconversion. Il y a aussi des adolescents qui participent aux activités agricoles de la ferme où ils habitent, chez leur parents.

Quelque images pour situer l'environnement de la formation :

Début de la formation qui doit durer une demi-journée.

L'objectif de la formation est présenté par Ramadass.

Les agriculteurs ont été divisés en trois groupes de 4 à 5 personnes. Ramadass a demandé à chaque groupe d'aller à différents endroits des champs alentours et d'identifier des exemples concrets de facteurs nuisibles pour les plantations (insectes, parasites...).


Au bout d'une heure, chaque groupe est revenu sur la place centrale, et Ramadass leur a demandé de dessiner les exemples de plantes malades, et les différents facteurs pouvant causer ces maladies. 
Il leur a aussi demandé de modéliser le cycle de développement des plantes, et d'indiquer les solutions qui peuvent exister dans l'environnement local pour lutter contre les éléments nuisibles aux plantes.

Chaque groupe dessine son schéma.




Ramadass modélise le diagramme des flux d'énergie des plantes.

Un petit déjeuner pris dans la matinée, le temps d'une pause.

Chaque groupe propose ensuite ses solutions et tout le monde commente.

Dans la logique de l'agriculture écologique, toute la faune de la nature et certains insectes ne sont pas forcément des nuisibles, mais au contraire des prédateurs des nuisibles des plantes. L'objectif d'entretenir la biodiversité est de trouver et maintenir un équilibre naturel qui permet aux prédateurs d'exister et de protéger les cultures contre les nuisibles.

C'est une logique novatrice pour ces agriculteurs qui sont tous passé par l'agriculture avec engrais chimiques et pesticides coûteux. Dans la logique de l'agro-chimie industrielle, tous les insectes et animaux sont considérés comme nuisibles, ce qui détruit progressivement la biodiversité, et apauvrit la qualité des sols. Dans cette dernière logique, au bout d'un certain nombre d'années, les récoltes sont insuffisantes, et très sensibles aux sécheresses.

Au contraire, la logique de l'agriculture naturelle est tournée vers le durable, composant avec les différents éléments de la biodiversité, y compris dans la diversité des semences traditionnelles (dites paysannes en Europe), plus importante que dans l'agriculture proposée par les industriels de l'agro-chimie.

A la fin de la formation, l'ONG Kudumbam offre un plant d'arbre
à chaque participant, qu'il pourra planter sur son terrain.

Une photo de groupe avant que chacun ne rentre chez soi.

Les formations pour les agriculteurs biologiques, soit en cours de conversion, soit plus expérimentés, sont assurées périodiquement, afin de mettre à jour les connaissances. Le suivi sur le long terme de l'ONG Kudumbam permet aussi d'entretenir la motivation pour ne pas céder à la facilité de revenir vers l'agro-chimie industrielle (qui est beaucoup plus risquée en terme d'investissements, et qui provoque inévitablement la ruine des agriculteurs en cas de mauvaise récolte, ce qui arrive souvent à cause du dérèglement climatique).

- Formations assurées auprès des jeunes scolarisés en primaire :

Kudumbam intervient auprès des plus jeunes générations vivant en milieu rural (toutes les familles disposent de terres cultivables dans les campagnes indiennes) pour les sensibiliser au plus tôt aux principes de l'agriculture biologique et à la préservation de la biodiversité.

Nous sommes allés visiter une des 40 écoles primaires publiques, financées par l'Etat du Tamil Nadu, où Kudumbam intervient auprès des jeunes de 6 à 12 ans.

Ce sont d'abord les enseignants qui sont sensibilisés aux principes de l'agriculture biologique. Ils retransmettent ensuite ces savoirs à leurs élèves.

Visite d'une classe d'enfants de 9 à 12 ans, le plus haut niveau de l'école, qui compte deux classes.

Les deux enseignants des deux classes.

L'ensemble des élèves de l'école est réuni pour notre visite.


L'équipe de Kudumbam intervenant depuis plus de 20 ans dans ces écoles, elle a encouragé la plantation d'arbres dans l'enceinte de tous les établissements. En faisant le tour, nous pouvons nous rendre compte de la présence d'une grande variété d'arbres et d'arbustes.



Il y a même quelques poules qui fournissent des oeufs
pour les repas des élèves le midi.

L'enseignant fait régulièrement découvrir les différentes variées d'arbres à ses élèves.

Nous en profitons pour découvrir différents équipements :

La réserve d'eau potable.

Des sanitaires, il y a un bâtiment pour les garçons, un autre pour les filles.

La classe de plus petit niveau.

Comme vous pouvez le constater sur la précédente photo, il n'y a pas de table ni de banc dans cette classe. L'école recherche des soutiens financiers pour faire fabriquer ces équipements.

Quelques photos de groupe avant de terminer notre visite :


 Kudumbam a offert des plants d'arbres aux élèves pour les emmener chez eux.
 
La façade avant de l'école.

Il y a un objectif essentiel à l'initiation des plus jeunes aux principes de l'agriculture naturelle : C'est aussi par les enfants que leurs parents, parfois encore utilisateurs d'engrais chimiques et de pesticides dans leurs cultures, peuvent être incités à se convertir à l'agriculture naturelle.

Article rédigé par Tony Coiplet.


mardi 12 septembre 2023

Voyage en Inde du Sud - Découverte de l'ONG Kudumbam (Emmaüs International) - Partie 3

Rencontre avec deux agriculteurs biologiques près de la ferme de Kolunji

Au cours de la première semaine de mon voyage dans l'Etat du Tamil Nadu, en Inde du Sud, et après avoir visité la ferme écologique de Kolunji, près de Trichy, j'ai pu aller à la rencontre de deux agriculteurs convertis à l'agriculture biologique depuis maintenant une quinzaine d'années.

Ces deux agriculteurs, M. Aravindan et M. Kalaiselvan, sont venus chez le premier pour nous réunir et présenter leurs activités.

Réunion de présentation des activités des deux agriculteurs biologiques.
De gauche à droite : Oswald Quintal (de Kudumbam), 
M. Vijayakumar (frère de M. Aravindan, qui le représente),
 M. Kalaiselvan et Ramadass (de Kudumbam).
    

M. Aravindan et M. Kalaiselvan se sont convertis à l'agriculture biologique depuis une quinzaine d'années. Ils ont commencé par suivre les formations proposées par l'ONG Kudumbam, à la ferme de Kolunji située à quelques kilomètres.

Ils expliquent volontiers que leur conversion depuis un mode d'agricultures suivant les principes de l'agro-industrie chimique vers un mode d'agriculture biologique, dans le respect des principes enseignés par Kudumbam, demande quelques années pour être mise en oeuvre. M. Kalaiselvam précise pour sa part qu'il lui a fallu 4 ans pour effectuer la transition.


La ferme de M. Aravindan

Etant en visite dans la ferme de M. Aravindan, nous avons pu nous rendre compte des équipements mis à disposition dans sa ferme. Kudumbam a soutenu la création d'une petite entreprise collective, la Kolunji Farmer Producer Company, qui réunit 300 agriculteurs de la localité, dont Mr Aravindan et M. Kalaiselvan font partie.

L'objectif de l'entreprise est de permettre à ces agriculteurs de transformer les céréales qu'ils produisent (plusieurs variétés chaque année) et de les commercialiser par eux-mêmes. Avec le soutien de Kudumbam, ils ont reçu une subvention de l'Etat pour disposer de ces machines. Elles sont installées sur le terrain de M. Aravindan mais sont à la disposition des 300 agriculteurs membres de l'entreprise.

Le frère de M. Aravindan, qui le représentait au moment de notre visite, nous a fait visiter le bâtiment dans lequel les agriculteurs de la Kolunji Farmer Producer Company effectuent la transformation jusqu'au conditionnement. 

Voici quelques images :

Le bâtiment qui abrite les machines. Il est situé à côté des terrres agricoles.

Vue vers l'intérieur du bâtiment depuis l'entrée.




Chaque machine est prévue pour une céréale particulière. Pour cette raison, il y a autant de machines que de variété de céréales produites. Toutes fonctionnent à l'électricité.




Il y a des machines pour décortiquer, peler, concasser, broyer, notamment pour obtenir des graines sans pelure ni coquille, ou des farines.

Exemple de céréale avant d'être passé en machine (à droite) et après (à gauche)
pour être partiellement décortiquée. Parfois, une variété de céréale
 doit passer par plusieurs machines pour être entièrement décortiquée.

D'autres machines sont entreposées à l'extérieur. Elles ont des fonctions variée pour transformer tous types de céréales produites, jusqu'au conditionnement.




Cette machine (seule à avoir un moteur thermique) sert à planter les semis dans les rizières.

 M. Aravindan (à gauche) et M. Kalaiselvan (à droite).

Another Farmer Producer Company, the Kovil Veerakudi, a pu investir aussi dans une production d'énergie électrique propre, avec l'installation de panneaux solaires. Ils disposent de 15 KW/Heure d'énergie électrique, utilisés principalement pour une pompe qui puise l'eau dans un puits situé près du bâtiment où sont entreposées les machines.

Quand ils ont besoin d'énergie supplémentaire pour faire fonctionner leurs machines, ou quand il n'y a pas assez d'énergie solaire dû à un faible ensoleillement, les agriculteurs utilisent l'énergie électrique du réseau national. Le Tamil Nadu est suffisamment développé pour que tous les habitants aient accès au réseau électrique, y compris en milieu rural (de même pour le téléphone mobile et l'accès à Internet par la 4G).

Disposer d'une production d'énergie électrique autonome permet de faire des économies sur la facture d'électricité, car les machines utilisées pour la transformation des céréales sont gourmandes en électricité.

L'installation de panneaux électriques solaires.


La ferme de M. Aravindan dispose d'un large puits, comme beaucoup d'agriculteurs, dans lequel il peut pomper l'eau pour arroser ses cultures lorsque les pluies de mousson sont insuffisantes, ce qui est de plus en plus fréquent décennies après décennies.


Après pompage, l'eau du puits est envoyée dans un réseau de tuyauteries enterrées à 30 centimètres sous les sols sur une partie des champs de la ferme.

Des éléments de tuyauterie visibles depuis les abords d'un champs de cannes à sucre.

Ce réseau de tuyauteries permet de consommer 5 fois moins d'eau que s'il fallait irriguer en surface.

Le champs de cannes à sucre irrigué par le sous-sol.

En suivant les principes enseignés à la ferme-école de Kolunji, M. Aravindan a aussi planté différents types d'arbres et d'arbustes autour des ses parcelles de champs. En voici quelques images :

Une plantation de bananiers à gauche aux abords du champs de cannes à sucre.

A gauche, la limite du champs de cannes à sucre, 
à droite différentes variétés d'arbres et d'arbustes plantés depuis 15 ans.

Les bananiers aux abords du champs, et devant, d'autres plants attendent d'être plantés.

Vue plus lointaine des arbres et arbustes situés aux abords du champs de cannes à sucre, caché derrière.

De l'autre côté de la voie d'accès à la ferme, d'autres bâtiments et terres non exploitées sont utilisés pour d'autres fonctions : Elevage de moutons, avec son bâtiment pour les abriter. 



Le petite bâtiment ci-dessous est utilisé pour produire du vermi-compost naturel, à partir des déchets organiques issus de la transformation des récoltes et des déjections des animaux d'élevage.



La visite terminée, nous allons voir la seconde ferme, celle de M. KAlaiselvan.
Sur cette photo, on peut voir la ligne électrique du réseau national.


La ferme de M. Kalaiselvan

M. Kalaiselvam dispose d'une quinzaine d'hectares de terres situés à quelques kilomètres de la ferme école de Kolunji. Depuis sa conversion à l'agriculture naturelle, il s'est progressivement spécialisé dans la production de riz à partir de semences traditionnelles (paysannes), pour aujourd'hui en produire 64 variétés.

L'avantage de produire une telle diversité, est de développer des variétés plus résistantes à la sécheresse que d'autres (y compris celles issues des OGM, qu'il ne cultive pas), et de pouvoir les commercialiser progressivement afin de promouvoir et de développer à plus large échelle ce type de semences.

M. Kalaiselvan est devenu convaincu que seule l'agriculture naturelle permettra de surmonter les sécheresses toujours plus nombreuses depuis les années 1980. Comme beaucoup d'agriculteurs ayant achevé leur conversion, il a été aidé par l'ONG Kudumbam en allant se former à la ferme de Kolunji.

Il a toujours été accompagné par les équipes de Kudumbam, à tel point que depuis quelques années, il est devenu aussi formateur pour de plus jeunes agriculteurs qui veulent se tourner vers l'agriculture naturelle.

La variété de riz qu'il cultive est inédite en Asie du Sud, ce qui a permis à M. Kalaiselvan de se forger une réputation au delà des frontières de l'Inde, dans plusieurs pays d'Asie. Il se déplace de temps en temps en Asie du Sud-Est pour témoigner de son travail et des effets bénéfiques de l'agriculture biologique sur la condition de vie des agriculteurs de sa région. Il est régulièrement interviewé par des journalistes qui viennent le voir depuis différentes partie du Monde, notamment d'Europe et d'autres pays d'Asie.

Quelques images pour découvrir sa ferme :








La mécanisation n'est pas absente dans l'agriculture indienne, Les machines sont plus petite que chez nous en Europe, car adaptée aux dimensions des fermes elles aussi plus petites (les agriculteurs indiens possèdent souvent 2 à 3 hectares de terres et jusqu'à 15 à 30 hectares pour les plus grandes exploitations).


Selon les principes qu'il a appris à la ferme de Kolunji, M. Kalaiselvan élève aussi des animaux (vaches, moutons). Les déjections de ces animaux entrent dans la composition de préparations, notamment pour la production d'engrais naturels, ou pour produire des répulsifs contre les parasites qui peuvent attaquer les cultures. Les vaches et les moutons produisent aussi du lait pour la consommation de la famille, et de temps en temps, servent de nourriture afin de fournir un apport en protéines animales.

Sur une parcelle de son champs, M. Kalaiselvan fait pousser différentes variétés d'arbres et d'arbustes, afin d'en utiliser les feuilles. Celles-ci vont entrer aussi dans la composition des engrais naturels, des répulsifs contre les parasites, et aussi de plantes médicinales qui seront toutes utilisés pour la ferme et la famille qui y vit.




Une préparation utilisée comme répulsif contre les parasites des plantes.

Une autre machine utilisée pour retirer les mauvaises herbes.

On élève aussi des dindes.

M. Kalaiselvan (à gauche), avec Ramadass (à droite). 
Nous prenons le temps d'échanger sur son expérience d'agriculteur biologique.

Conclusion de ces deux visites :

M. Aravindan et M. Kalaiselvan sont deux agriculteurs qui ont régulièrement suivi les formations dispensées par l'ONG Kudumbam à la ferme de Kolunji depuis une quinzaine d'années. Ils sont toujours régulièrement suivis par l'équipe de Kudumbam, ceci à permis de maintenir la motivation pour rester durablement des agriculteurs biologiques.

Depuis quelques années, ces deux agriculteurs ont acquis suffisamment d'expérience pour faire partager leurs connaissances et leurs pratiques auprès d'autres agriculteurs qui souhaitent se lancer dans une conversion vers l'agriculture naturelle. Ils interviennent désormais en tant que formateurs à la ferme de Kolunji, mais aussi dans d'autres Etats de l'Inde, voir à l'étranger, surtout en Asie du Sud-Est.

Article rédigé par Tony Coiplet